Encre de zines
(ou l'histoire de mecs qui aiment assez le skatebaord
pour se retrouver entre eux le soir dans une cave !)
Aujourd'hui, rien que la scène skate française
est couverte par plusieurs magazines, une éventualité
même pas espérée jusque-là. En vingt
ans. Entre les vidéo-magazines (deux par mois minimum),
les tonnes de papier glacé couvert de switch crooks déversées
chaque mois
dans vos kiosques et skate-shops, et les sites Internet de glisse
(hum!), quelle est la motivation à sortir l'appareil de
papa, de la colle et une paire de ciseaux? Satellites, e-mails
via téléphones portables, appareils numériques...
Qui donc, en l'an 2000 (le Fameux!), voudrait encore se
tacher les doigt d'encre, risquer la morsure de la feuille de
papier (toujours douloureuse!), même pire: faire le moindre
effort sans espérer gagner quoi que ce soit!? Et l'argent
dans tout ça, hein!? Qu'est-ce qu'ils espèrent
exactement tous ces jeunes, là, qui cassent leur petit
cochon en porcelaine pour acheter des pellicules et des cartes
Copytop!? Ils veulent notre place, ou quoi!?
Car en cette période aussi technologique que consumériste,
où le skateboard est devenu une carrière comme
une autre, on n'a jamais vu autant de publications amateurs Idans
le plus beau sens du termel sur les comptoirs des skate-shops.
Informations locales, blagues incompréhensibles si vous
n'étiez pas à la soirée de Zac' la semaine
dernière, interviews de héros undergrounds... Vous
trouverez de tout dans ces zines. Parfois même des choses
dépassant l'entendement. Et c'est pour ça que c'est
beau! Faire un fanzine, c'est un peu comme de skater tout seul
le parking de la supérette: y'a personne pour vous faire
chier! Alors profitez-en.
Fuck
The Blaireaux FTBX
Le doyen, le mythe, la bible, le père spirituel: j'en
passe et des meilleurs... Fuck The Blaireaux, comme son nom ne
l'indique pas, est le fanzine de skate par excellence.
Deux cent vingt-quatre (224 ! !) numéros et autant de
couvertures, des collaborateurs devenus des stars, des stars
devenues collaborateurs, le tout pour faire circuler l'info'
à Beauvais, une initiative comme on en voit rarement et
qui n'a pas encore photocopiée sa dernière page...
Peux-tu nous présenter Fuck The Blaireaux ?
Il y avait un fanzine qui tournait dans les shops sur Paris,
genre Chattanooga, Hawai Surf et tout ça, Boneless Mag
je crois, ce qui nous a fortement inspiré pour faire un
fanzine sur Beauvais. C'est parti aussi du fait que je bossais
dans un Bureau Information Jeunesse, donc j'avais accès
à une photocopieuse, ce qui est fondamental pour faire
un fanzine, surtout au début quand tu n'as pas les moyens.
Le fanzine a démarré en décembre 1988, donc
on a sorti plein de
numéros, c'était la grande époque Public
Domain et compagnie. Il y avait Artus dans le coup à l'époque.
La grande étape, c'est que François Bégnez
a incorporé l'équipe, et qui avait déjà
fait un fanzine qui s'appelait Skatos Mag, fanzine ultra underground,
qui sortait à un exemplaire, et
qui était franchement annonciateur de ce qu'allait être
FTBX. Au numéro 54, on est allé voir Noway, Jeff
donc, et on est allé présenter nos services et
il y a eu un FTBX 54 dans Noway. Ça a permis de faire
connaître le fanzine dans la France entière, même
en Belgique, ca faisait environ un an que ça existait.
Après ça, il y a eu une mode de fanzine et on en
a inspiré plus d'un, il y a eu Fuck The Macro. C'est pour
ça que dans la rubrique archives sur Internet, j'ai fait
une colonne ceux qui nous ont inspiré et ceux que l'on
a inspiré. Flocon Fluo, on a jamais vraiment bossé
avec eux, mais ils nous ont fait délirer, et leur côté
scato à déteint plus tard sur FTBX, c'était
Vianney et toute la bande, ils sont dans le snowboard maintenant...
Bégnez a continué de collaborer avec Noway, il
y faisait des Bd, et nous on continuait, avec Artus et les autres
potes, et ca a continué jusqu'aux années 91-92,
où le skate commencait à baisser. Là il
ne restait plus qu'un noyau de mordus et la quantité de
parution n'était plus la même, mais on a survécu,
à l'époque street, à l'époque baggy...
On a sorti le numéro 200 en 96 ou 97, et depuis environ
deux ans on est sur Internet, et c'est vrai que ça change
la fonction du fanzine,
ça n'est plus pareil, mais on existe toujours même
si on a un peu de mal à sortir des numéros.
Est-ce qu'il y a une nouvelle génération qui
participe ?
Non, pour l'instant c'est plutôt les vieux renards
comme moi qui écrivent encore, avec Mimo, Damien et Jay,
c'est plutôt Les anciens. Les nouveaux, j'essaie de le
faire participer mais c'est balèze, il faut déjà
qu'ils sachent lire et écrire, et c'est pas évident.
Là, on a sorti le dernier numéro, qui est le 224,
et on l'a distribué au glissex'po du mois de septembre.
Au niveau du tirage, le plus important c'est celui qui a été
dans Noway, il a dû sortir à 20000 ou 30000
exemplaires, sinon ça va de un exemplaires à deux
cents. Généralement, on les file sur Beauvais,
les copains, quand on se déplace sur glissex'po, sur les
contests, mais on a pas du tous les moyens d'être distribué
dans les shops, donc forcément on sera peu ou pas diffusé
en
dehors d'un cercle de connaissances.
Tu peux nous parler du contenu ?
Il est relatif au groupe de skaters qu'il y avait à
l'époque, c'est vraiment un fanzine de copains, c'est
pas du tout comme certains qui veulent ressembler à des
magazines.
C'est vraiment des conneries entre nous, des news qui n'intéressaient
que nous, des vannes et des slogans, c'est vraiment un truc entre
potes... Maintenant c'est vrai que depuis que c'est sur Internet,
ça a agrandi le cercle des gens qui lisent et qui peuvent
comprendre, on a aussi un chat sur Irc, contre ce que fait Agoride
et Caramail, qui sont loin de tout le mouvement underground.
Mais on a eu des problèmes en plus il faut toujours quelqu'un
pour l'animer
C'est intéressant car Internet règle tous les problèmes
de diffusion. Les idées et la créativité,
ça ne manquent pas, mais pour le tirage et la diffusion,
c'est plus compliqué. Et si tu as un sponsor, ça
veut parfois dire compromis, et là, tu ne fais plus ce
que tu veux, tu ne pas dire de trucs sur les marques, ni dire
que tel ou tel shop est naze, et que la wear c'est merdique.
Puis récupérer la thune c'est galère, si
tu laisses le fanzine en dépôt-vente, quand tu récupères
vingt francs tu es content (rires). Ça m'a fait rigoler
le dernier stand Volcom au dernier glissex'po, il était
dans le style des fanzines, en noir et blanc, un peu punk, un
peu hardcore, on baigne vraiment là-dedans...
Vous êtes une association ?
On a fait des stickers, des tee-shirts, des concerts... Mais
on n'a pas d'existence légale. C'est pareil, qui dit association
dit rendre des comptes, et si les gens demandent à lire
ce que l'on fait, ça ne va pas aller, on va être
censuré.
Tu es limité au niveau des moyens, mais tu fais et tu
dis ce que tu veux dans un fanzine. C'est vrai que FTBX est un
peu à part, car d'autres font des interviews, des reportages,
des trucs vachement sérieux, alors que nous on préférait
faire des Bd, des news, des conneries, ou Artus
qui fait des numéros que avec Artus. C'était vachement
personnel comme démarche.
Vous n'étiez pas satisfaits de la presse " officielle
" ?
C'était surtout pour nous informer entre nous, un
délire entre potes. On ne s'est jamais situé par
rapport à ça. Ça a plus à voir avec
des conneries que l'on va sortir en soirée en teufs, ou
sur un spot, tous les slogans viennent d'événements
de ce type.
Pourquoi ce nom: Fuck The Blaireaux ?
C'est un copain qui a inventé ça, parce que
les blaireaux c'étaient surtout ceux qui nous faisait
chier à l'époque, voilà, Fuck Les Blaireaux.
Il y a deux noms, Fuck The Blaireaux et FTBX, qui est devenu
le nom du posse, des initiales ça passe mieux, quand tu
fais une demande de
subventions, ça fait mieux de dire FTBX, plutôt
que Fuck The Blaireaux, c'était avant NTM et tout ça,
ça se faisait pas trop de mettre des initiales à
l'époque... C'était aussi
une volonté quand le clubs fonctionnait et qu'on avait
une mini-rampe, d'avoir un dénominateur commun entre nous,
c'était en 87 88...
Sinon pour finir tu peux te présenter ?
Moi, je travaille toujours au Bureau Information de Beauvais,
je reçois des jeunes, c'est mon boulot, sinon j'ai trente-huit
ans, je suis marié, et j'ai un gamin qui a six ans et
demi. Toujours un peu de skate, j'ai une longboard et une Bucky
Laseck d'époque. Un peu de mini, de bowl, un peu de n'importe
quoi, mais à mon niveau attention !, je
n'arrête pas de régresser depuis dix ans, quand
tu as trente-huit ans et que tu fais cent kilos, tu ne peux pas
faire des flips comme si tu avais quinze ans et que tu faisais
quarante kilos ! ! !
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